 Elle est plus connue que son créateur, et s’est imposée durablement dans le paysage national. Ses usages et sa petite taille ont fait que chacun l’avait dans la poche, la recevait avec son courrier. Elle continue, copiée, à hanter les pièces jaunes de l’Euro. Mêlée aux gestes quotidiens, porteuse d’une symbolique méconnue, profonde et fort ancienne, c’est notre Semeuse.
Un double hasard permit au génie d’Oscar Roty de lui donner naissance.En 1886, le Ministère de l’Agriculture lança un concours pour sa médaille. Roty, déjà connu, se porta candidat, et avança suffisamment son travail pour en tirer une belle plaque de bronze, visible au Musée Roty. Mais apprenant que son maître, Ponscarme , était sur les rangs, il eu l’élégance de se retirer. Le projet dormit dans son tiroir pendant dix ans.
C’est en 1895 que le Ministre Paul Doumer, afin de soutenir sa politique, souhaita une nouvelle série monétaire.
Roty, graveur déjà quasi officiel, fut désigné sans concours pour la monnaie d’argent.
L’enjeu était important, aussi bien pour l’artiste que pour l’homme politique.A cette époque on ne plaisantait pas avec les symboles monétaires !
C’est alors que Roty se souvint de son ancien projet. Avec quelques modifications, apparemment légères mais déterminantes, il en fit cette figure devenue emblématique.

Son succès populaire fut immédiat.
On transformait les pièces en bijoux de toutes sortes.
Un pareil consensus incita le Ministère des Postes à demander une version adaptée au timbre.
Roty envoya un modèle en relief au graveur des Postes, son ami Eugène Mouchon.
Ne prenant aucunement ombrage de son rôle de simple exécutant, Mouchon au contraire couvrait Roty d’éloges.
La Belle Epoque était aussi celle des civilités…
Pierre-Marc Chantereau
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